To geek or not to geek ? That’s not a question !

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L’interne et le big data

To geek or not to geek ? That’s not a question !

Faut-il vraiment choisir entre la chirurgie urologique, la recherche, et les nouvelles technologies ? Adnan El Bakri, interne rémois, a décidé de tout combiner. Résultat : la création d’un algorithme prédictif de métastases dans le cancer du rein, qui lui a valu une nomination à la médaille de l'Académie de chirurgie pour le prix « Jeune talent chirurgical ».

Il n’aime vraiment pas suivre les sentiers habituels. Après avoir fondé la startup InnovSanté, dont nous avions parlé dans un article précédent, Adnan El Bakri a pris une année de dispo entre sa 4e et sa 5e année d’internat de chirurgie urologique, pour faire un master 2.

« Je voulais rester dans l’innovation appliquée à la santé, donc j’ai choisi la branche du M2 de sciences chirurgicales de Paris-Sud qui venait d’être créée : nouvelles technologies interventionnelles et cancérologie », explique-t-il.

C’est Reims ou rien !

Le choix du labo a été plus difficile, car Adnan voulait absolument rester à Reims. « La plupart des internes font leur labo à Paris, mais j’en avais assez que Reims ne soit vu que comme un désert médical peu attractif, je voulais prouver qu’il est tout à fait possible d’y faire de la recherche de qualité », affirme-t-il.

Quand il entend les externes rémois se plaindre de l’absence de débouchés médicaux intéressants, il réagit. « Certains considèrent qu’il ne sert à rien de travailler pendant l’externat, parce que la seule chose à faire de toute façon, c’est médecine gé », déplore-t-il. « Résultat : on est avant-derniers du classement. J’essaye de leur faire comprendre qu’il faut se créer ses occasions, et que tout peut arriver si on s’en donne les moyens ! »

Après avoir démarché plusieurs laboratoires de Reims, il convainc une équipe travaillant sur une nouvelle technologie de biophotonique, la micro-imagerie infra-rouge tissulaire, de monter un projet de recherche basé sur du big data (voir encadré ci-dessous).

Les ordinateurs, une histoire d’amour

Comment en est-il en est arrivé là ? Élaborer des algorithmes relève quand même plus de la programmation que de la chirurgie… « J’étais dans une équipe pluridisciplinaire qui dispose de compétences en biophysique et en bioinformatique », répond-il.

Mais il confesse avoir toujours été attiré par les ordinateurs. « Petit, au Liban, j’ai harcelé mes parents pendant des mois pour en avoir un, et finalement mon père a pris un crédit pour m’en offrir un en récompense de mes bons résultats scolaires », se souvient le jeune chirurgien geek.

Un profil atypique pas toujours bien perçu

« En France nous sommes très en retard par rapport aux pays anglo-saxons sur le big data appliqué à la santé », reprend-il plus sérieusement. « Mais la médecine prédictive et personnalisée, c’est l’avenir, surtout en cancérologie où on voit que chaque cancer est unique et évolue différemment. »

Dans son entourage professionnel chirurgical, son profil atypique n’est pas toujours bien perçu. « Certains pensent que je m’éloigne de la chirurgie, qui est une sorte de voie sacrée à laquelle il faut se dédier corps et âme », remarque-t-il. « Entre la startup et ce projet de recherche, je suis un peu "marginalisé". Sans le soutien de mon chef de service, le Pr Larré, je n’aurais jamais pu aller aussi loin. Des copains internes de chir’ dans d’autres CHU me confirment que chez eux, il serait inenvisageable de faire pareil. ».
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Le projet de recherche d’Adnan

La cohorte étudiée était composée de patients ayant subi une néphrectomie totale pour un cancer du rein, non métastatique au moment du diagnostic, et dont la moitié a secondairement évolué vers la dissémination, alors que l’autre moitié restait en rémission complète. Le but de ce projet était de réaliser une classification qui permette de prédire l’évolution d’un cancer du rein vers les métastases.

« Aujourd’hui, on ne dispose que d’échelles clinico-biologiques peu fiables, et de données anapath opérateur-dépendantes », détaille Adnan. « Il est donc très difficile de déterminer la durée de suivi optimal, par exemple. » Ce travail, qu’il souhaite poursuivre dans le cadre de sa thèse de science, lui a valu une nomination à la médaille de l’Académie de chirurgie pour le prix « Jeune talent chirurgical », après avoir été classé major de son M2.

Source:

Sarah Balfagon

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