Jeter l’éponge quand on est médecin : et si on en parlait ?

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Pas facile d’abandonner le stétho' quand on a consacré dix ans de sa vie à ses études. Et pourtant, bien des médecins ont envie de tout lâcher pour faire autre chose… sans trouver d’espace pour s’exprimer.

Jeter l’éponge quand on est médecin : et si on en parlait ?

Certaines choses sont mal faites. Prenez la durée de l’internat. Un médecin obtient généralement sa thèse à l’âge où le commun des mortels aborde la fameuse « crise de la trentaine » : une envie de tout plaquer pour se lancer dans une autre carrière. Mais pour le praticien fraîchement émoulu, céder aux sirènes du changement aurait quelque chose du sacrilège. Y aurait-il un tabou autour de la question ?

« On en parle, mais en rigolant », témoigne Olivier Le Pennetier, président de l’InterSyndicat National des Internes (ISNI). « Certains disent qu’ils vont se faire fleuristes. Moi, par exemple, je dis que je vais partir élever des chèvres. » Alors, si internes et jeunes médecins prennent les choses à la blague, c’est qu’ils sont tous heureux dans leur carrière ? Pas si vite ! « Quand ils sont malheureux, ils ne le disent à personne, et personne ne s’en rend compte », explique le syndicaliste.

Chirurgien cherche empathie

Il faut dire qu’il existe peu d’espaces de parole pour permettre aux médecins qui rêvent d’autre chose de dialoguer ensemble. Rien de semblable en tout cas à ce dont disposent leurs confrères américains, avec des groupes Facebook comme Physician nonclinical career hunters, ou des forums comme celui du site Drop out club.

Sur ce dernier, des messages de médecins en détresse tombent tous les jours. « Chirurgien cardiaque en burnout cherche opportunités ou empathie », annonce l’un d’entre eux. « Quelqu’un connaît-il des options de carrière alternatives pour un ophtalmo' ? », demande un autre. Tous reçoivent des conseils bienveillants d’autres praticiens ayant quitté le champ médical.

Médecin malheureux ou pas de médecin du tout ?

Alors, faudrait-il développer ce genre de site en France ? « C’est une question-piège », répond Olivier Le Pennetier. « Bien sûr qu’il faut pouvoir dire qu’on a envie d’arrêter. Mais le risque, c’est de favoriser les arrêts de la médecine. » Vaudrait-il donc mieux un médecin malheureux que pas de médecin du tout ? Olivier Le Pennetier ne le pense pas. « L’idée, c’est de travailler mieux pour avoir envie de continuer », assure-t-il.

Mais en attendant que les conditions de travail changent pour les médecins français, ceux-ci peuvent toujours aller faire un tour sur les forums de Drop out club. Des praticiens espagnols ou argentins y postent sur des topics en castillan. Alors, pourquoi pas en français ?

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