`A polypatho, polypro

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Il n’est pas rare qu’un médecin généraliste doive gérer en consultation des cas de plus en plus complexes, au vu de l’augmentation de l’espérance de vie et des comorbidités chez les patients. Améliorer la qualité des échanges avec les spécialistes devient donc un enjeu crucial.

`A polypatho, polypro

Un cas, en 2020. Jean-Luc, 56 ans

Jean-Luc diabétique insulino-requérant, a une néphropathie avec clairance de la créatinine (MDRD) autour de 40 mL/min qui s’aggrave. Il se présente en consultation pour une toux devenue productive évoluant depuis 48 heures, qui le gêne de plus en plus.
Le généraliste récupère la radio du thorax demandée par téléconsultation : pneumonie franche lobaire aiguë. L’administration d’antibiotiques va être compliquée. Il demande l’avis de l’infectiologue du CHU, à 40 km de là, qui propose de l’hospitaliser et lui réserve un lit.

L’infirmière libérale qui fait régulièrement des soins à domicile à Jean-Luc ainsi que de l’éducation thérapeutique, est automatiquement avertie par notification, et pourra reprendre son suivi à la sortie. À l’hôpital, l’interne a accès au suivi glycémique grâce à l’appli mobile de Jean-Luc et profite de l’hospitalisation pour demander une consultation de diabétologie.

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Télé-expertise

L’acte de télé-expertise médicale est une aide au diagnostic, apportée à un médecin par un autre médecin situé à distance du premier, qui lui fait parvenir des informations à l'aide d'un dispositif télématique (1). Elle est déjà exercée de manière pluriquotidienne par les professionnels de santé, mais, malheureusement, le recours au fax reste toujours très (trop) fréquent. Néanmoins, depuis quelques mois, on constate une croissance importante des outils de télémédecine. Parmi eux, il y a ceux de télé-expertise, qui favorisent l’échange entre professionnels de santé. De nouveaux projets de loi (2) cherchent à favoriser son adoption. Cependant des débats persistent concernant le financement de cette pratique ; ils ne sont d’ailleurs probablement que l’expression de la problématique sous-jacente de disparité existant pour la cotation et les tarifs des actes médicaux, « intraspécialité » bien sûr mais surtout « interspécialité ».

Ces interrogations mises de côté, il reste vrai que certains médecins n’ont pas vraiment attendu la fin des discussions pour essayer d’utiliser la télé-expertise. Tout en respectant les règles de déontologie médicale, ces outils et méthodes permettraient d’aider à éviter des situations potentiellement mortelles, qui surviennent encore de nos jours alors qu’il est aussi facile d’appeler un ami à des dizaines des milliers de kilomètres qu’un autre habitant au coin de la rue.

À quand une véritable assistance au diagnostic et au traitement ?

Autre signe des temps : la progression vertigineuse (3) des publications et données scientifiques, dont la connaissance est nécessaire pour exercer une médecine up-to-date. Le site Recomedical a publié ses statistiques pour l’année 2017 : pas moins de 303 recommandations de bonnes pratiques, toutes spécialités confondues (mais surtout celles susceptibles d’intéresser les médecins généralistes) ont été publiées. La multiplication des « clics » n’est pas une solution. Une organisation plus structurée et systématique serait bien plus profitable et permettrait le stockage de données de manière sécurisée ainsi qu’une intercommunication entre les différents outils.

Avec l’apport de l’intelligence artificielle, l’impact de ces technologies sur les pratiques médicales devrait voir le jour prochainement. Par exemple, la Mayo Clinic se penche sur le sujet de manière très sérieuse et pragmatique, affirmant que plusieurs petites aides auront plus d’effet que les grands projets d’IA type « moonshots » dont parle la presse. Reste à espérer qu’on pourra bénéficier de ces technologies à court ou moyen terme…

En conclusion

Les professionnels de santé sont en première ligne pour la création d’outils numériques permettant d’améliorer la communication et la coordination entre eux… Mais il y a encore du travail !

SOURCES
(1) La télé-expertise : un acte médical à reconnaître… et à rémunérer
(2) http://www.ticsante.com/PlFSS-2018-feu-vert-a-la-generalisation-des-actes-de-teleconsultation-et-de-tele-expertise-NS_3721.html
(3) Garba, S., Ahmed, A., Mai, A., Makama, G., & Odigie, V. (2010). Proliferations of Scientific Medical Journals: A Burden or A Blessing. Oman Medical Journal, 25(4), 311–314. http:// doi.org/10.5001/omj.2010.89

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