MeToo à l’hôpital : médecin, infirmière, aide-soignante et standardiste, elles racontent...

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Elles sont infirmière, aide-soignante, médecin ou encore membre du personnel administratif de l'hôpital : quatre femmes racontent à l'AFP les agressions dont elles ont été victimes de la part de médecins. Des témoignages recueillis après les accusations de l'infectiologue Karine Lacombe envers le médiatique urgentiste Patrick Pelloux.

MeToo à l’hôpital : médecin, infirmière, aide-soignante et standardiste, elles racontent...

© Midjourney x What's up Doc

Sara*, 34 ans, infirmière

"Ce jour-là, j'étais en poste en maternité", se souvient Sara. En 2017, la jeune-femme de 27 ans était infirmière vacataire dans un hôpital de Seine-Saint-Denis. "J'avais besoin d'un médecin et je suis allée trouver l'interne. Je l’avais déjà vu et il semblait assez aimable". Mais sur le trajet, entre deux portes battantes, "il m’a attrapé les fesses""Il m’a dit quelque chose du style ‘à la queuleuleu’ pour faire passer ça pour un jeu. J'étais sidérée, je suis restée figée, je n'ai rien pu faire".

L'infirmière prévient les responsables infirmiers, qui la soutiennent. Le chef de service en revanche la met en garde: "Il nous manque des médecins, ce sera ta parole contre la sienne".

Elisa*, standardiste, 51 ans

"Je travaillais la nuit dans un local un peu éloigné du bâtiment principal de l'hôpital", dans le Calvados, raconte Elisa dix ans après les faits. "Un médecin anesthésiste est passé me voir et m'a proposé plusieurs choses à manger. Il était alcoolisé et j'ai refusé". Le médecin, de garde, retourne à son poste avant de revenir à la charge. "Il a réussi à me coincer contre le mur et m'a pris par le cou pour m'embrasser de force. J'ai reculé, mais il est venu sur moi et il a continué : je ne voyais pas d'issue, je paniquais". Elle a finalement été sauvée par le déclenchement d'une alarme. Quelques jours plus tard, incapable de dormir, en arrêt maladie, elle prend trop de somnifères et finit aux urgences.

Ses plaintes auprès de la gendarmerie et de l'ordre des médecins ont été classées. L'anesthésiste a été renvoyé de l'hôpital et a trouvé un poste à Paris.

Sandrine*, aide-soignante, 58 ans

"Pour ma première fois au bloc opératoire, j'ai demandé où je devais me mettre et l'anesthésiste m'a indiqué un endroit", raconte Sandrine, qui travaillait dans un établissement en Normandie. "Il m'a ‘frottée’ pendant toute une partie de l'opération. J'avais à peine 30 ans, j'étais tétanisée". Le chirurgien comprend ce qu'il est en train de se passer et propose à la jeune femme de changer de place dans le bloc.

Quelques années plus tard, elle est dans le service ORL. "Le chirurgien était connu pour avoir des aventures avec des élèves infirmières, il racontait tout dans les détails"Un dimanche matin, alors que c'était calme, il m'a demandé d'aller lui chercher une blouse. Il m'a suivi jusqu'au vestiaire et a essayé de m'embrasser. J'ai balancé le portant à blouses sur lui et je me suis enfuie".

Elle a parlé de l'incident à son syndicat mais n'a pas porté plainte. "A l’époque, j'ai culpabilisé. Je me suis demandée ‘mais qu’est ce que j’ai fait pour qu’il fasse ça ? Est-ce que j’ai eu un geste, un regard qu'il a mal interprété?’".

Julia*, 33 ans, médecin

"On était en train de faire une visite médicale. D'un coup le médecin se met à gesticuler, à se frotter contre mon torse et ça a un peu débraillé ma blouse", décrit Julia, alors interne de 27 ans. Elle ne laisse rien paraître face au quarantenaire, qui prétexte une blague vue à la télévision.

Il finit par s’excuser, sous la pression de ses collègues femmes. Aujourd'hui, elle se dit très surprise de ce geste de la part d’un médecin plutôt "bienveillant" malgré "son esprit carabin" et "ses blagues salaces".

https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/depuis-48-h-les-temoignages-affluent-vers-une-nouvelle-vague-metoo-lhopital

Plus tôt dans son cursus, dans un bloc opératoire, "le chirurgien m'a demandé d'être derrière lui pour regarder de près l'opération" "Ma poitrine est collée à son dos, et là, il lance à l'interne en face de lui ‘elle a un BT!’”. Julia, alors 23 ans, comprend peu après la signification de ces initiales: beau thorax. "Une blague lourde".

*Les prénoms ont été changés à la demande des femmes qui témoignent.

Avec AFP

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